À quand le retour du slang américain des années 1920 ?

Les années folles riment bien souvent avec nuits de débauche, mais aussi avec la création de grandes œuvres de musique, de littérature, d’arts plastiques et bien sûr, de mode. Durant cette époque d’après-guerre, c’est comme si plus rien n’avait véritablement de valeur, tout le monde était happé par une décadence ambiante, qui s’est finalement soldée par la Grande Dépression.
voiture époque

Si caractéristique, le style des années 1920 a fait depuis plusieurs retours, dans différents milieux. On se souvient encore de l’explosion des soirées à thème “années folles” suite à la sortie du film “Gatsby le magnifique” en 2013. Nous voilà de nouveau dans les années 20 d’un nouveau siècle, et nous avons voulu en profiter pour refaire surgir quelques expressions de l’anglais argotique de l’époque. 

Les expressions du langage courant ou d’argot sont bien souvent éphémères, victimes d’une mode qui explose à un moment donné puis disparaît aussi vite qu’elle s’est imposée. Mais tout comme la coupe carré, certaines expressions devraient avoir droit à leur grand come-back, vous ne trouvez pas ? Embarquez avec nous dans ce voyage dans le temps et (re)découvrez certaines pépites oubliées de la langue anglaise.

Le meilleur de l’argot américain des années 1920

The Cat’s Pajamas (“le pyjama du chat”)

Signification : le/la meilleur(e), le/la plus cool

Si à cette époque on vous affublait de “pyjama du chat”, vous faisiez alors partie des personnes les plus cool et/ou vous excelliez dans ce que vous faisiez. Certains ont essayé de faire référence à d’autres animaux pour signifier la même chose, avec par exemple the eel’s ankle (“la cheville de l’anguille”) ou encore the monkey’s eyebrows (“les sourcils du singe”), mais ces expressions n’ont pas eu autant de succès que The Cat’s Pajamas. N’y avait-il alors rien de plus cool qu’un chat en pyjama, ou bien doit-on chercher l’origine de cette surprenante appellation un peu plus loin ? 

En fait, l’image derrière cette expression s’avérait tout-à-fait parlante à cette époque. Il était courant d’appeler les personnes en vogue et douées, des cats (“chats”), en particulier les musiciens de jazz ou les danseuses de charleston. Le mot pajamas (ou pyjamas, en anglais britannique) vient de l’hindoustani pāy-jāma ou du persan pāy-jāmeh et fait référence aux vêtements confortables et lâches que l’on porte quand on reste chez soi :  un style véritablement tendance à cette époque. 

Juice Joint (“Articulation de jus”)

Signification : un bar clandestin, une boîte de nuit

Ces fameux chats ultra-cool devaient alors avoir une bonne planque où se retrouver et festoyer ensemble, n’est-ce pas ? C’est là qu’interviennent les juice joints. Non non, il ne s’agissait pas de mignons petits stands de jus de fruit, contrairement à ce que leur nom pourrait laisser croire. Dans les années 1920 aux États-Unis, la prohibition battait son plein. Les bars clandestins poussaient comme des champignons dans les grandes villes, et il était fréquent d’entendre des phrases du type I have to go see a man about a dog (“Je dois aller voir un homme à propos d’un chien”), un nom de code pour dire qu’on allait chercher du whiskey. 

Les noms de code pour l’alcool fusaient, puisqu’il était illégal de boire des boissons alcoolisées. On devait se montrer créatif dans sa façon de communiquer si on voulait maintenir en vie le monde frénétique de la nuit. En réalité, le mot juice (“jus”) s’utilise encore aujourd’hui aux États-Unis, pour faire référence à l’alcool. Let’s hit up the juice joint (“allons au bar à jus”) ne sonne peut-être pas très bien mais on trouve ça toujours plus stylé que “d’aller en boîte”.

On A Toot (“sur un klaxon”)

Signification : faire la tournée des bars

On reste sur le thème de l’alcool avec cette autre expression amusante pour une soirée bien arrosée. On ne connait pas les origines exactes de cette expression, mais on sait que le mot toot a de nombreux sens. Il peut faire aussi bien référence à une flatulence malodorante, qu’à de la cocaïne, au fait de jouer du cor harmonique, ou même à un tas d’ordures. 

L’expression a cependant certainement un lien avec une autre image largement employée : to toot one’s horn (“s’envoyer des fleurs, se faire mousser”), étant donné qu’une personne ayant trop bu passe souvent d’abord par une phase totalement désinhibée où l’auto-estime s’exprime en toute liberté. Enfin bref, c’est assez drôle de penser aux Américains des années 1920 aller on a toot (“se la coller”) et être zozzled (“bourrés”) au point de perdre all their cabbages (“toute leur thune”).

Giggle Water/Juice (“eau de ricannement/jus”)

Signification : alcool

Bon, cette fois promis, c’est la dernière fois qu’on vous parle d’alcool dans cet article. (On peut difficilement  éviter le sujet quand à l’époque les gens n’avaient pour seule envie que de consommer de la précieuse substance interdite.) Encore une fois, il fallait se mettre d’accord sur des codes communs pour parler de ce produit interdit, et on a trouvé le nom de giggle water particulièrement bien pensé. Bien plus sympathique que hooch (“gnôle”), non ? 

Quant à juice (“jus”), également slang des années 1920 aux États-Unis, ce mot appartenait au langage de tous les jours et même parfois pour désigner des boissons non-alcoolisées. Prenez noodle juice (“jus de nouilles”) par exemple. Il s’agit en fait de thé, mais l’expression reste plus agréable que le bon vieux pisse mémé.

Egg (“œuf”) 

Signification : un homme, quelqu’un qui vit de manière extravagante

Si des Néo-zélandais lisaient cet article, ils se demanderaient surement ce que ce mot vient faire dans notre liste d’expressions d’il y a un siècle, puisque dans les pays du sud Pacifique, egg peut – même aujourd’hui – faire référence à quelqu’un de désagréable.  Il n’est également pas rare d’entendre aujourd’hui les expressions rotten egg (“œuf pourri”) ou bad egg (“œuf pas bon”) pour une mauvaise fréquentation. À l’inverse, on pourrait aussi appeler une personne particulièrement sympathique un good egg (“œuf bon”), mais ça ne sonne pas terrible quand on veut faire un compliment.

Pendant les années folles, on utilisait le mot egg tout simplement pour appeler quelqu’un dans un contexte familier, comme dans What’s up, egg? (“Quoi de neuf mec ?”). Le mot était aussi employé pour parler d’une personne riche, qui dépense sans compter. Cet usage vient peut-être du nom de la banlieue fictive de West Egg dans le roman de F. Scott Fitzgerald, où Gatsby le Magnifique organisait de fabuleuses réceptions et vivait une vie de luxe avec ses acolytes nouveaux riches.

Know One’s Onions (“connaître ses oignons”)

Signification : savoir de quoi on parle, s’y connaître 

On connaît l’expression “Occupe-toi de tes oignons !”. Eh bien aux États-Unis des années 1920, on employait une autre référence à ce fameux bulbe, mais cette fois, pour exprimer l’excellente maîtrise d’une activité ou d’un sujet d’une certaine personne. 

Mais pourquoi les oignons ? Bonne question. Une des explications consiste à dire que l’expression vient du nom de l’éditeur du célèbre Oxford Dictionary : C.T.  Onions. Même si Mr. Onions devait certainement maitriser son sujet, nous penchons pour une autre explication plus vraisemblable :  Le mot “oignons” ici n’est pas véritablement porteur de sens, il s’agit plutôt d’un objet lambda pour symboliser justement tout type de choses, tout comme quand on “tombe dans les pommes” ou qu’on envoie quelqu’un “se faire cuire un œuf”.

Glad Rags (“joyeuses fringues”)

Signification : tenue élégante à porter pour une soirée

On a tous besoin d’un peu plus d’ondes positives en cette période de pandémie, alors nous espérons que la dernière expression de notre liste fasse vraiment son come-back et nous fasse un peu rêver ! Glad vient de plusieurs mots germaniques faisant référence à la brillance et la douceur. Avec le temps, ce mot a pris le sens de “brillant”, “étincelant” ou encore “joyeux”. De nos jours, glad rags est considéré comme un terme britannique désuet pour désigner des vêtements élégants. Vous aurez remarqué la contrariété des mots employés, étant donné que des rags ne sont normalement pas de beaux vêtements mais plutôt des bouts de tissus, des chiffons ou des guenilles : mais c’est là tout le charme de l’expression !

En réalité, l’expression remonte au début du siècle dernier, mais s’il y a une décennie où il faut dépoussiérer ses vêtements et aller danser, c’est bien celle des années folles. En tout cas, glad rags ou pas, on vous conseille d’enfiler la tenue qui vous plait et vous fera vous sentir the cat’s pajamas au moins le temps d’une soirée !

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