Lorsqu’on étudie à Londres, ou dans n’importe quelle autre ville du Royaume-Uni, on peut pas y échapper : pour valider un semestre ou une année universitaire, on demande aux étudiant·e·s de rédiger un essay, c’est-à-dire une dissertation en anglais.
Si vous êtes sur le point de vous inscrire à l’université, ou si vous êtes déjà étudiants mais que vous y avez pour l’instant encore échappé, préparez-vous psychologiquement. Car les moyens d’échapper à la préparation de l’essay en anglais sont de plus en plus limités. Aujourd’hui, dans n’importe quelle université du monde, de plus en plus de cours sont dispensés en anglais, dont certains sont obligatoires, et les dissertations en anglais sont beaucoup plus fréquentes que les examens classiques de chez nous. Les examens d’anglais divisent les étudiants en deux catégories : ceux qui réussissent haut la main et ceux qui ratent leurs examens pendant trois, voire cinq ans, en attente d’un miracle.
Et il y a pire. Dans certains cas, des cours sont entièrement dispensés en anglais, non seulement dans les pays anglophones mais aussi dans de nombreux pays de l’UE, dont la France. C’est ce que l’on appelle une arme à double tranchant : elle peut vous permettre d’aller étudier dans n’importe quel pays de l’UE, ne serait-ce que pour un Erasmus, mais elle peut aussi vous créer d’énormes difficultés.
Cependant, un certain nombre d’astuces peuvent vous aider à limiter la casse. Bien sûr, une bonne base d’anglais est nécessaire, mais l’anglais académique varie beaucoup de la langue anglaise de tous les jours. C’est pourquoi, dans cet article, nous allons étudier la structure d’une bonne dissertation en anglais sous toutes ses coutures : plan, argumentation et langue. Et pour vous permettre de mieux comprendre les différents points, j’utiliserai à titre d’exemple un essay en anglais rédigé par mes soins, sur les droits de l’homme au Japon.
(Lire aussi : Comment préparer un « elevator pitch » ?)
L’essentiel : qu’est-ce qu’une bonne dissertation en anglais ?
1. La dissertation en anglais : c’est-à-dire ?
Avant de nous mettre à écrire des pages et des pages, nous devons clarifier la nature de l’essay académique. Les formations diplômantes en anglais privilégient ce type d’examen parce qu’il ne s’agit pas de l’interrogation classique dans laquelle les étudiants récitent les notions apprises. Dans un essai, les leçons doivent être comprises, internalisées et retravaillées. La connaissance, en effet, n’est pas le point final mais seulement la base sur laquelle construire une argumentation complexe et originale. En d’autres termes, l’université de type anglo-saxon préfère l’essay académique, car il apprend aux étudiants à faire des recherches, à argumenter et surtout à utiliser les connaissances qu’ils ont étudiées, ce qui est tout sauf une fin en soi.
2. La recherche : Google Scholar, votre site de chevet
Une fois sa nature comprise, la première chose à faire est de partir de l’essence même de la dissertation en anglais : la recherche, qui se divise en deux étapes.
La première et la plus courte est le choix du sujet. En général, les étudiants ont le choix parmi plusieurs sujets, ou dans les cours les plus extrêmes, où je me retrouve toujours, ils doivent même choisir leur sujet eux-mêmes. Après une brève sélection dans laquelle vous identifiez deux ou trois possibilités, une petite recherche sur Google Scholar vous montrera à quel point il est facile de trouver vos sources : articles universitaires et livres sur le sujet. Si vous vous rendez compte, à l’issue de cette première recherche, que les sources sont rares, je peux vous le dire tout de suite : abandonnez et changez de thème.
La deuxième étape de la recherche est la partie la plus longue et la plus importante du processus de préparation d’un essay universitaire en anglais. À ce stade, vous devrez lire un certain nombre d’articles universitaires, de livres et de chapitres de livres, en identifiant les informations qui, selon vous, seront les plus utiles à votre dissertation. Pendant cette étape, je vous recommande de prendre de nombreuses notes, classées par auteur, éventuellement sur un ordinateur, afin de pouvoir retrouver facilement des informations utiles à l’aide de la fonction « recherche ». En général, un essay de 2 500 mots comporte environ 12 sources académiques, ou primaires, plus des articles de journaux tels que The Economist, qui constituent les sources dites non académiques, ou secondaires.
Mon essay de 2 000 mots comportait 11 sources académiques, telles que les suivantes :
– Barrett, K., 2004. Women in the Workplace: Sexual Discrimination in Japan. Human Rights Brief, 11(2), pp.1-4.
3. Thèse de l’essay en anglais
Au milieu ou même à la fin de votre recherche, vous devrez presque toujours choisir une thèse à défendre au cours de votre essay. D’après mon expérience, les thèses précises ont plus de chances d’obtenir de bonnes notes car elles mènent à un essay précis et non pas vague, dont l’argumentation est très forte. Chaque professeur a des préférences très spécifiques quant au type de thèse qu’il apprécie, je vous suggère donc de leur demander conseil.
Dans mon essay, la thèse était :
“when international and Japanese norms and customs clash there is a compliance gap between pressured ratification of treaties and the country’s norms, which result in human rights violations.“
4. Entretien ou échanges par e-mail avec les enseignants
À ce stade, en effet, bien que cette pratique ne soit malheureusement pas encore très répandue chez nous, l’idéal est de contacter directement les professeurs. N’ayez pas peur de les harceler : même si vous n’en avez pas l’impression parfois, c’est leur travail de vous répondre ! Dans un échange par e-mail ou lors d’une courte rencontre, je vous recommande de leur présenter votre thèse et vos recherches, pour voir s’ils aiment la direction que prend votre essay.
Retroussez vos manches : la rédaction
5. Structure d’un essay en anglais
Avec les conseils que vous avez (espérons-le) reçus de l’enseignant⸱e, c’est maintenant à vous de vous asseoir à votre bureau et de réorganiser toutes vos notes, afin d’esquisser une structure logique qui va venir défendre votre thèse.
Je sais, je sais : vous n’avez jamais vraiment cru à cette histoire de structure. Moi non plus, à vrai dire, avant de déménager à Londres. Pendant plusieurs années, j’ai toujours trouvé que c’était une énorme perte de temps. Dans une dissertation en anglais, cependant, la structure est cruciale, à tel point qu’elle est parfois incluse dans les points à évaluer pour calculer la note finale.
Un essay se compose généralement de trois parties : introduction, développement (ou main body) et conclusion. Le développement (ou « main body » en anglais), qui est la partie qui nous intéresse maintenant, doit être composée de plusieurs paragraphes de 250-350 mots. Les paragraphes sont des blocs de texte logiques qui viennent soutenir votre thèse : chaque paragraphe doit présenter un argument différent à l’appui de la thèse, et les paragraphes doivent se suivre dans un ordre logique.
Le développement de mon essay se composait de six paragraphes : le premier examinait le modèle théorique sur lequel l’essay était basé, expliquant quelles théories de politique internationale étaient utilisées. Les deux suivants analysaient comment les stéréotypes de genre et les idéaux familiaux traditionnels conduisent à la discrimination contre les femmes (dans le deuxième) et la communauté LGBTQ+ (dans le troisième). Les quatrième et cinquième démontraient ensuite comment les idéaux d’ethnicité, de pureté, de japonisme, ont conduit à la discrimination des minorités ethniques (dans le quatrième) et des migrants et réfugiés (dans le cinquième). Enfin, dans le sixième paragraphe, j’expliquais les mesures qui pouvaient être prises pour améliorer la situation.
6. PQE
Chaque paragraphe individuel est comme un mini-essay, et doit suivre une structure précise, le fameux PQE : Point (point, argumentation), quote (citation), explanation/examples (explications et exemples). En d’autres termes, la première phrase doit constituer l’argument du paragraphe.
Voici un exemple tiré de ma dissertation en anglais. La première phrase constitue le P, la seconde, le Q, et celles qui suivent, le E.
“Japan’s traditional gender and family ideals also result in a discrimination against members of the LGBTQ+ community. McLelland observes how in Japanese society ‘little space is given to reflection on issues concerning gay rights, […] lifestyle or […] identity.’ (2000: 460). These categories clash with Japan’s traditionalist society and the idea of nation as a family, although theoretically protected by the International Covenant on Civil and Political Rights (ICCPR). The country fails to respect the rights of these groups, lacking a comprehensive anti-discrimination legislation against discrimination on the grounds of sexual orientation, gender identity and expression (Amnesty International 2020: 5). Moreover, Japan does not recognise same-sex marriage at national level, violating the rights of same-sex partners to marry and have a family, breaching articles 17 and 23 of the ICCPR. This could also stem from Japan’s dramatic birth rate, as homosexuals have been defined ‘unproductive’ (6). Conversely, one criterion that allows transgender people to change their birth gender is sterilisation, violating the prohibition of inhuman or degrading treatment under article 7 (6). Such inadequate respect inevitably streams in the failure to protect and fulfil. The absence of same-sex marriage implies the inability to access a partner’s health insurance, to claim tax exemption, or to have joint custody of an adopted child (Amnesty International 2020: 6). Moreover, LGBTQ+ members risk violence, harassment and other abuses and are often forcibly outed, violating their right to privacy. For instance, in 2016 two transgender women were placed in a male detention facility where they faced physical and mental abuse and had their hair shaved off because their gender identity was not recognised (7). Thus, in implementing the ICCPR norms, Japan has localised them with highly traditional gender roles, politics of shame and rejection of what is different.”
7. Citations et bibliographie
Comme vous pouvez le constater, lorsque je cite un article universitaire, je le mets entre guillemets et à la fin j’écris, entre parenthèses, le nom de l’auteur, l’année de publication de la source et la page où se trouve la citation. Ce style, qui est le même que celui que j’ai utilisé pour construire ma bibliographie, dont je vous ai montré un exemple dans la section « Recherche », est appelé Harvard, mais il en existe de nombreux autres et vous devriez, là encore, demander au professeur⸱e celui qu’il ou elle préfère.
Les bonnes règles pour une dissertation en anglais : ne jamais commencer par l’introduction !
8. Introduction
Une fois le main body rédigé et les citations choisies, vous pouvez enfin rédiger l’introduction et la conclusion de votre dissertation en anglais. Jusqu’à il y a quelques années, je commençais toujours un essay par l’introduction, mais c’est une erreur de débutant, si je peux me permettre.
L’introduction, en effet, doit être rédigée en dernier, car elle trace le chemin de votre dissertation en anglais, que vous devez donc avoir déjà écrit. En principe plus courte qu’un paragraphe normal, l’introduction doit contenir une brève présentation du sujet, environ la moitié de la longueur de l’introduction, puis ce que l’on appelle le signposting, dans lequel vous fournissez au lecteur une carte pour lire votre essay, en expliquant quelle thèse vous soutenez et avec quels paragraphes vous allez la défendre.
Voici un exemple :
“in this essay I argue that when international and Japanese norms conflict there is a compliance gap between pressured ratification of treaties and the country’s norms, stemming in human rights violations. To do so, I will examine how the traditional notions of ethnic purity and fixed gender societal roles result in discriminations against women, members of the LGBTQ+ community, ethnic minorities and refugees, migrants and asylum seekers.“
Un autre point essentiel à noter est que vous devez délimiter votre essay : si vous omettez des informations qui pourraient être pertinentes, pour des raisons de place bien sûr, le fait de les préciser vous évitera bien des problèmes.
Voici un exemple :
Although violations also occur in relation to the rights of children, freedom of assembly, comfort women and the death penalty, these go beyond the scope of this essay.
9. Conclusion
Il en va de même pour la conclusion, qui doit être rédigée en dernier. Dans celle-ci, vous devez résumer le contenu de votre essay, en évitant à tout prix d’ouvrir de nouvelles parenthèses ou de formuler de nouvelles questions.
10. Style et vocabulaire d’un essay universitaire en anglais
Enfin, last but not least, le style ! Tout d’abord, votre essay ne doit pas contenir de termes trop familiers, et doit pour cela éviter autant que possible les verbes à particules. Utilisez plutôt leurs homologues latins, comme « continue » au lieu de « carry on » pour « continuer ». Les formes contractées sont également à proscrire ! Oubliez can’t, won’t et hasn’t, vous devez toujours écrire la forme non contractée : cannot, will not et has not .Enfin, les connecteurs sont très importants : apprenez à utiliser indeed (en effet), en début de phrase, however (cependant), moreover et furthermore (de plus), nevertheless et nonetheless (malgré que, en dépit de).