Ah, la Scandinavie ! Une nature à couper le souffle, de grandes plaines à perte de vue, des forêts luxuriantes… Mais aussi du poisson, séché ou mariné, à tous les coins de rue… Ah, mais attendez ! Avez-vous vu passer cette sirène blonde à dos d’élan ? Oh là là, qu’il est difficile de reconnaître tous ces doubles d’Alexander Skarsgård se promenant sur les ponts norvégiens tout en parlant cette langue si mélodieuse… Mais au fait, quelle langue ? Ou plutôt, quelles langues ? Les langues scandinaves bien sûr ! Nous allons vous expliquer dans cet article en quoi les langues scandinaves se ressemblent et se distinguent.
Les langues scandinaves : quelles sont-elles ?
Les langues scandinaves se ressemblent tellement qu’on les assimile parfois à de simples dialectes d’une seule et même langue. En effet, lorsqu’on parle l’une des trois langues scandinaves, on comprend les deux autres, du moins en partie. L’origine de ces langues remonte au vieux norrois, communément appelé « la langue des Vikings » par les non-Scandinaves.
Les langues scandinaves, toutes d’origine germanique, se divisent en deux groupes : d’une part, les langues scandinaves orientales, parmi lesquelles on retrouve le danois, le norvégien et le suédois, et d’autre part, les langues scandinaves occidentales, dont l’islandais et le féroïen (Eh non ! Le finnois n’est pas une langue scandinave, ni même d’ailleurs indo-européenne, et il s’apparente davantage au hongrois, aux langues sames ou à l’estonien). Avec 10 millions de locuteurs, le suédois est la langue la plus parlée de Scandinavie. Le norvégien et le danois, quant à eux, comptent environ 5 millions de locuteurs chacun.
Pour une langue scandinave apprise, deux langues scandinaves offertes ?
Pour ce qui est du vocabulaire, le danois et le norvégien sont très similaires, pour ne pas dire quasiment identiques, tandis que leur prononciation diffère considérablement. Le norvégien et le suédois, pour leur part, sont plus proches en ce qui concerne la prononciation, mais se distinguent au niveau du lexique.
Les trois sœurs scandinaves
À la question des différences entre les langues scandinaves, j’aime bien répondre par ce que j’appelle « l’analogie des trois sœurs » :
- La langue suédoise, c’est la sœur aînée. Elle est certes la plus grande, mais elle n’est pas aussi importante que ce qu’elle croit.
- La langue norvégienne, c’est sa cadette. Elle écoute et comprend ses deux sœurs et joue le rôle de médiatrice.
- La langue danoise, c’est la benjamine rebelle. Elle fume en cachette et personne ne la comprend.
Cette métaphore n’est pas si éloignée de la réalité. En effet, une étude publiée en 2005 par les linguistes Delsing et Lundin Åkesson montre que les Danois ont plus de difficultés à comprendre leurs voisins norvégiens et suédois qu’à l’inverse.
Les conversations entre Suédois et Danois sont réputées difficiles, parfois même embarrassantes. En tant que Suédoise, j’ai enfin atteint le seuil où je peux certes comprendre le danois, mais cela me demande toujours beaucoup de concentration. Et je suis sûre que celles et ceux qui parlent danois avec moi ressentent exactement la même chose.
Prononciation
Des clichés sur les Danois et leur langue, il en existe des dizaines : « On dirait qu’ils sont tout le temps bourrés ! », « C’est comme s’ils avaient quelque chose au fond de la gorge ! », « Les Norvégiens ivres parlent parfaitement le danois ! ». Eh oui, vous l’aurez compris, en Scandinavie, nous aimons bien nous moquer les uns des autres, mais en fin de compte, ces clichés ne reflètent qu’une grande méconnaissance linguistique. En effet, le danois n’est pas une langue « peu soignée » ou « mal articulée », elle se prononce tout simplement comme ça !
La prononciation du danois
L’une des caractéristiques du danois est le très grand écart qu’il existe entre l’orthographe et la prononciation (amis francophones, cela ne vous rappellerait-il pas une autre langue ?). Les mots sont souvent écourtés, les consonnes adoucies, presque effacées, et les terminaisons sont « avalées ».
De plus, contrairement au norvégien et au suédois, de nombreux mots danois contiennent une sorte de coup de glotte, appelé stød, qui ressemble à un craquement de voix. Ainsi, pour les locuteurs du suédois et du norvégien, la prononciation du danois ne semble suivre aucune règle.
« Comment t’appelles-tu ? »
- Hvad hedder du? (danois)
- Vad heter du? (suédois)
- Hva heter du? (norvégien)
Pas si différent que ça, n’est-ce pas ? Bien sûr, lorsqu’il s’agit d’une question ou d’une expression de base, les difficultés sont moindres, mais les choses se corsent lorsqu’on parle sentiments, politique ou encore astrophysique. Et je l’avoue, bien trop souvent, nous jetons l’éponge et avons recours à l’anglais, alors qu’en fin de compte, il suffirait de s’habituer à la prononciation du danois et de comprendre les différences élémentaires.
Je crois parler au nom de la plupart des Suédois quand j’affirme que nous n’apprendrons jamais les règles de base de la prononciation danoise, par exemple, pourquoi eg se prononce « ay, » af « ow » ou øg « oy ». Et bien évidemment, lorsqu’on ne connait pas les règles, on finit par croire que tout est simplement aléatoire.
Vocabulaire : méfiez-vous des faux amis !
Afin de pouvoir parler avec mes voisins scandinaves, j’ai dû saisir quelques différences essentielles de vocabulaire. Quand des Danois ou des Norvégiens me parlent, je dois souvent avoir recours à mon vocabulaire passif, c’est-à-dire à des mots que je comprends, mais que je n’utilise pas forcément. De plus, il existe plusieurs faux amis dont il faut se méfier tout particulièrement.
Les faux amis scandinaves
- « roligt » : en Suède, faire quelque chose de roligt est associé à une activité très divertissante. En Norvège, roligt est assimilé à une activité beaucoup plus calme et tranquille !
- « rar » : Au Danemark, il n’est pas rare d’utiliser le mot rar (qui signifie « charmant », « mignon ») dans un rapport de séduction. Mais attention à ne pas l’utiliser en Norvège, où il signifie plutôt « bizarre ».
Orthographe : privilégiez l’écrit !
À l’écrit, le danois et le norvégien sont relativement similaires – à quelques exceptions de vocabulaire près. Pourquoi ? Entre le XIVe et le XIX siècles, la Norvège faisait partie du royaume du Danemark, dont la capitale administrative et intellectuelle était Copenhague. Tout document écrit était alors rédigé en danois. À l’oral, par contre, le danois n’a jamais pris le dessus sur le norvégien, et la proximité de la Suède a joué un rôle fondamental.
Par conséquent, une conversation dano-norvégienne sera généralement jonchée de hva? (« quoi ? »). En revanche, s’ils ne communiquaient que par SMS, Danois et Norvégiens se comprendraient sans aucune difficulté.