Th-fronting, th-fronting… Ce terme ne vous dit rien ? Ne vous en faites pas, vous n’êtes pas les seuls ! Mais alors le Th-fronting, quèsaco ? Eh bien c’est le fait de prononcer le graphème th en anglais comme s’il s’agissait du son /f/ ou /v/. « Thing » devient alors « fing », « brother » se transforme en « bruvver », et « three » et « free » sont prononcés de la même façon.
Essayons de comprendre ensemble pourquoi, comment, quand et où ce phénomène se manifeste et quelles en sont les conséquences pour les apprenants de la langue de Shakespeare.
La prononciation du graphème th
Dans la plupart des variétés et dialectes de l’anglais, le son th se prononce, selon le mot, /θ/ ou /ð/. Ces deux sons, que nous allons découvrir ensemble, sont ce que l’on appelle des fricatives dentales. Le th se prononce /θ/ au milieu ou à la fin d’un mot, p. ex. dans « method » ou « month », mais parfois aussi au début de certains mots tels que « three ». Le son /ð/, pour sa part, se retrouve au début de mots courts comme « that » et « this » ou au milieu de mots tels que « father ». Pour prononcer ces deux sons, on place le bout de la langue entre ses dents ou contre ses dents supérieures.
Le son /θ/ est connu sous le nom de th soft (mou). En effet, lorsque qu’on le prononce, nos cordes vocales ne vibrent pas. Il s’agit donc d’un son sourd. Le son /ð/, connu comme th hard (dur), est quant à lui sonore : pour le prononcer il faut faire vibrer ses cordes vocales. Et si vous essayiez ? Commencez par prononcer le mot « month », puis « the ». Vous percevrez tout de suite la différence entre ces deux sons !
Mais au fait saviez-vous que les sons /θ/ et /ð/ sont plutôt exceptionnels ? En effet, s’ils existent dans quelques langues européennes (par exemple l’islandais, l’espagnol castillan, le grec ou encore le gallois), on ne les rencontre que très rarement sur les autres continents. Ceci pourrait être dû au fait qu’ils sont particulièrement difficiles à prononcer.
Les enfants n’ayant généralement pas toutes leurs dents lorsqu’ils commencent à parler, les sons /θ/ et /ð/ sont parmi les derniers à être acquis. Et en vieillissant, les gens ont tendance à perdre leurs dents, et sans elles, il devient difficile, voire impossible, de prononcer les sons /θ/ et /ð/.
Quelle est l’origine du Th-fronting ?
Le fait de comprendre que les consonnes fricatives dentales sont plutôt rares et difficiles nous permet de mieux appréhender le son TH. Autre élément à retenir : le changement linguistique. L’évolution d’une langue mène généralement de façon inconsciente à sa simplification.
Mais pourquoi donc remplacer les fricatives dentales par les sons /f/ et /v/ ? /f/ et /v/ sont des consonnes fricatives labio-dentales, que l’on prononce en plaçant les dents supérieures contre sa lèvre inférieure et en laissant sortir l’air par la bouche. Et cela les rend bien plus faciles à prononcer, quel que soit le nombre de dents que l’on possède !
Mais ce sont surtout les ressemblances entre /f/ et /v/ et les sons th qui font que même les locuteurs natifs puissent les confondre facilement. Vous l’aurez compris, les sons /f/ et /v/ se présentent comme une alternative plus facile que les sons th, tout en restant compréhensibles. Il n’est donc pas surprenant que le TH-fronting ait fait son apparition.
Où pratique-t-on le Th-fronting ?
Le Th-fronting ne concerne pas l’ensemble des pays anglophones. Toutefois, beaucoup de locuteurs natifs prononcent le th /f/ ou /v/ de façon plus ou moins occasionnelle ou systématique. Mais qui sont-ils au juste ?
On associe généralement la bonne prononciation du son TH à l’anglais britannique, plus précisément aux accents du sud de l’Angleterre et surtout de la ville de Londres. Néanmoins, il ne s’agit pas des seules variétés de l’anglais où l’on rencontre le Th-fronting. Il est également très répandu dans le nord-est de l’Angleterre, en anglais écossais et néo-zélandais, en anglais de Terre-Neuve et du Libéria ainsi qu’en anglais vernaculaire afro-américain.
Le Th-fronting n’était pas une caractéristique commune de l’anglais avant que cette langue ne se répande dans le monde. Ceci signifie donc que le Th-fronting n’a pas son origine dans une seule et unique variété de l’anglais, mais qu’il s’est plutôt développé à différentes époques dans plusieurs régions du globe. Il s’agit, par conséquent, d’un exemple de changement linguistique illustrant une tentative de simplification de la langue.
Un phénomène à adopter lorsqu’on apprend l’anglais ?
Pratiquer le Th-fronting pour éviter les difficultés liées à la prononciation des sons /θ/ et /ð/ ? C’est plutôt tentant ! Néanmoins, cela pouvant être mal interprété, voire mal vu, on déconseille généralement aux apprenant·e·s d’adopter cette prononciation.
Bien sûr, si vous parlez déjà couramment anglais ou si vous habitez une région dans laquelle le Th-fronting est répandu, la pratique de celui-ci au quotidien pourrait faciliter votre intégration et vous faire gagner en authenticité ! Cela dit, il n’est pas nécessaire de passer prononcer le son TH à la perfection pour s’intégrer ou se faire comprendre. De plus, le Th-fronting a encore aujourd’hui une connotation négative et est souvent associé à de la paresse ou à une mauvaise maîtrise de la langue.
Quelle que soit la décision que vous prendrez, il vous sera fort utile en tant qu’apprenant·e de savoir ce qu’est le Th-fronting. Ainsi, lorsque vous y serez confronté·e pour la première fois, vous aurez moins de mal à comprendre vos interlocuteurs et saurez que « fink » est en fait « think » et non un mot nouveau que vous n’avez pas encore appris !