Quand on parle des langues d’avenir, on évoque le chinois, parfois le russe, l’espagnol aussi. Plus rarement l’arabe, langue trop souvent oubliée. N’est-ce pas pourtant une prétendante sérieuse au titre ? Elle fait partie des 5 langues les plus parlées au monde. Langue des sciences, des arts, de civilisation et de religion, l’arabe a eu un impact colossal sur les cultures du monde. Année après année, fidèle à ses traditions, la langue arabe continue de voyager, de s’enrichir et de fasciner. Entre l’arabe littéral, ses innombrables dialectes et son alphabet reconnaissable entre tous, comment définir l’essence de cette langue insaisissable ? Babbel vous met sur la piste !
Où parle-t-on la langue arabe dans le monde ?
L’arabe est la langue officielle de 24 pays et l’une des 6 langues officielles de l’ONU. Il s’agit des 22 États de la Ligue Arabe, auxquels s’ajoutent l’Érythrée et le Tchad. La moitié de ces États arabophones sont en Afrique (Algérie, Comores, Djibouti, Égypte, Érythrée, Libye, Maroc, Mauritanie, Somalie, Soudan, Tchad et Tunisie). L’autre moitié se situe en Asie (Arabie Saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Oman, Palestine, Qatar, Syrie et Yémen).
Arabe, turc, persan… faisons le point ! La majorité des arabophones étant musulmans – et l’arabe étant la langue du Coran – un amalgame courant consiste à confondre langue arabe et Islam. Le plus grand pays musulman du monde n’est pourtant pas arabophone puisqu’il s’agit de l’Indonésie. L’arabe est une langue sémitique. Contrairement aux idées reçues, elle n’a aucun lien de famille avec le turc – qui appartiendrait au groupe des langues altaïques. Le persan ou farsi, première langue d’Iran, n’est pas apparenté à l’arabe. Il s’agit d’une langue indo-européenne… comme le français ! De même, en Afghanistan, les deux langues majoritaires sont des langues iraniennes : le dari et le pachto. La pratique de la langue arabe y est minoritaire, loin derrière l’ouzbek ou le turkmène. Elle est réservée à la religion et au commerce extérieur avec le Moyen-Orient.
L’alphabet arabe
Chez Babbel, nous avons pris l’habitude de démystifier les systèmes d’écriture. L’alphabet cyrillique ne demande pas plus de deux jours d’apprentissage. Notre tour du monde des alphabets nous a déjà fait voyager du Caucase à la péninsule coréenne. Quant à l’alphabet arabe… ce n’est pas un alphabet au sens où on l’entend pour l’alphabet latin ! Appelé abjad ou alphabet consonantique, l’alphabet arabe ne note que les consonnes. Il s’écrit et se lit de droite à gauche et comporte 28 lettres.
On retrouve ce système d’écriture dans d’autres langues, notamment le persan, le kurde et l’ourdou. Depuis l’an 1000, il est également utilisé par les Ouïghours. Jusqu’en 1928, il servait de transcription au turc qui utilise depuis une version de l’alphabet latin.
Arabe littéral et arabe dialectal
L’arabe est certainement le meilleur exemple de diglossie. La diglossie est le fait pour une langue d’être divisée en plusieurs variétés régionales, parfois non compréhensibles entre elles. L’arabe, en tant que langue, peut désigner deux réalités différentes : l’arabe littéral d’une part, l’arabe dialectal d’autre part.
L’arabe littéral est le nom donné à la langue standardisée. Langue administrative et politique, c’est celle qui est reconnue comme langue officielle des pays arabophones. C’est aussi celle que l’on retrouve dans le Coran, dans les médias et dans les précis de grammaire. Elle domine dans la communication écrite et formelle, dans la religion et dans les échanges internationaux. Mais dans les faits, personne n’a l’arabe classique pour langue maternelle. L’arabe dialectal est la langue utilisée à l’oral dans la vie quotidienne. Elle prend des formes très différentes d’un territoire à l’autre.
Pourquoi une telle diglossie ? C’est le fruit d’évolutions historiques, sociales et politiques. Comme toutes les langues vivantes, l’arabe change au fil du temps. Langue poétique devenue langue religieuse à partir du VIIe siècle, elle a conquis un immense territoire aux influences variées. Les anciens dialectes, pas entièrement disparus, se sont adaptés pour se mêler à l’arabe. Copte en Égypte, berbère au Maghreb, araméen en Syrie… L’histoire de la langue arabe est une histoire de migrations et d’enrichissements culturels. Intéressons-nous aux principaux dialectes de l’arabe.
Quels sont les principaux dialectes de l’arabe ?
Les distinctions dialectales de l’arabe se font à plusieurs niveaux. Les linguistes ont d’abord privilégié une approche par régions. Il y aurait ainsi un arabe occidental par opposition à un arabe oriental. Mais au sein même de ses régions, les différences sont nombreuses. Au point d’abandonner parfois la catégorisation en dialectes pour privilégier le terme de langues.
Arabe occidental et arabe oriental
L’arabe occidental, ou arabe maghrébin, désigne la variété linguistique présente – par ordre alphabétique des territoires – en Algérie, en Libye, au Maroc, en Mauritanie et en Tunisie.
Par déduction, tous les autres territoires arabophones sont rattachés à l’arabe oriental. On peut faire la distinction entre quatre aires linguistiques que sont :
– l’arabe égyptien ;
– l’arabe mésopotamien, principalement en Irak ;
– l’arabe levantin, en Syrie, au Liban, en Palestine et en Jordanie ;
– l’arabe péninsulaire, commun aux autres États arabophones de la péninsule arabique.
Arabe dialectal : quelques exemples
En arabe algérien, langue maternelle d’environ 40 millions de locuteurs, certaines voyelles ont tendance à disparaître. Par exemple, le mot سماء (s’ama, ciel) se prononce s’ma. À l’inverse, l’arabe syrien reste plus fidèle à l’arabe littéral dans la prononciation. Autre illustration : كيفاش ؟ (kifach, comment ?), وقتاش ؟ (weqtach, quand ?) et la tendance à ajouter -ach à la fin des mots interrogatifs en arabe algérien et en arabe marocain. Au Liban ou en Égypte, on prononce à l’inverse kif.
Qu’est-ce que l’arabizi ?
Preuve que l’évolution de la langue arabe est loin d’être terminée, un nouveau parler est apparu dans les années 1990. Il s’agit de l’arabizi, qui peut se comprendre comme la fusion de l’arabe et de l’anglais (inglizi en arabe) à l’image du franglais, ou comme la contraction des mots arabe et easy. L’absence de claviers arabes sur les premiers téléphones portables a conduit a remplacer les lettres manquantes par des chiffres. La lettre « ء » devient un 2, le « ع » devient un 3 ou encore le « ح » devient un 7. Un phénomène qui tend aujourd’hui à disparaître mais que l’on retrouve encore sur les réseaux sociaux.